Dans certaines philosophies, si on n’est pas prêt à atteindre la libération finale on passe sans discontinuité d’une existence à l’autre. Alors autant faire usage maintenant de toutes nos qualités physiques et mentales pour avancer. Concentrons-nous sur ce qui nous porte et nous tient à cœur, sans oublier d’être tolérant avec ses imperfections pour agir avec discernement. Extasiez-vous tous les jours sur le ciel, les fleurs, le calme. Dites vous que la pluie, « sale temps », est bénéfique pour les plantes, arbres qui nous entoure, même dans un square. Il ne s’agit pas de penser positif, il s’agit plutôt d’arrêter de penser négatif. C’est une nuance mais elle a ses effets. Il existe 500 histoires, jatakas, qui mettent en scène des perfections. Je vous propose d’illustrer ces étapes avec six clés tirées de contes venant de « Contes de la vie antérieure du Bouddha » aux éditions Seuil. J’ai ensuite fait un parallèle avec nos vies quotidiennes afin de voir comment nous pouvons façonner notre monde.

La pratique méditative et contemplative nous permet d’acquérir du recul sur la vie. Certes on ne pourra peut-être pas percer les mystères ultimes de l’existence, mais on peut éviter de se laisser aller à l’accablement ou à l’excès d’euphorie, en étant proche du milieu on a de grandes chances de réussir. Accompagnons-nous d’une source florissante d’inspiration, par la production artistique la peinture, la sculpture, la musique, le chant. En partant de vos envies projeter, maintenant, en vous ce que vous voulez vivre.

1er clé : Expérimente tes valeurs

La responsabilité

Le fils d’une famille riche constate que ses parents meurent sans même emmener une pièce d’or. Il décide alors de faire don de tout ce qu’il possède. Plus tard dans sa réflexion, il constate que tout est opposé : s’il y a souffrance, il y a bonheur. Il se dit alors que la responsabilité est un moyen de s’assumer. Si tu tombes dans un lac ce n’est pas la faute du lac. En définitif, si tu es tourmenté personne ne peut retirer tes entraves mentales. Prends-toi par la main, aie confiance en toi et cherche ta solution.

Le rythme des saisons ne nous attends pas. Engage-toi aujourd’hui dans le cycle de la vie et met-toi à l’œuvre rempli d’un cœur plein de courage. Déploie une énergie vigoureuse dans l’expérience de toutes tes actions. La vie est faite d’opposés, s’il y a des défauts il y a des qualités. S’il y a des qualités, il y a des défauts, expérimente les dans l’apprentissage. Choisis ce qui te convient, avance avec tes résolutions et développe les au cours de ton existence.

2ème clé : Faire différemment

La vertu

Un roi qui régnait avec correction et rectitude, rendait la justice sans égard à son propre intérêt ni ses humeurs. Il fit le constat que la cour de justice était vide. Interrogé il décide de partir à la rencontre de son peuple pour voir s’il avait un défaut qui pourrait expliquer cette situation. Mais on le couvrait d’éloges aux quatre coins de son royaume. Jusqu’au jour où il rencontra sur un pont un autre roi. Il avait le même titre que lui, le même âge que lui, la même fortune que lui. Aucun d’eux ne savait lequel pouvait avoir la priorité pour passer sur l’unique pont pour continuer sa route. Alors il décidèrent ensemble de demander aux cochers d’énumérer les qualités de chacun afin de voir qui sera prioritaire. Le cocher du second roi dit « si c’est dur il gagne par la force, si c’est doux il gagne par la douceur, si c’est mal par la rigueur, si c’est bon par la bonté ». Alors que le cocher du premier expliqua que son roi traite la haine par la douceur, le mal par la bonté, l’avarice par la générosité et le mensonge par la vérité. À ces mots le roi qui traitait le pire par le pire et le mieux par le mieux descendit de son carrosse et laissa passer le roi qui adossait des valeurs positives aux actes négatifs. Le roi su à ce moment là qu’il était sur une voie de vertu pour continuer de faire le bien autour de lui.

Quelles sont nos méthodes face aux difficultés. Nous arrive-t-il de dire qu’on ne lâchera pas parce qu’on a déjà perdu beaucoup. Ou au contraire sommes-nous capable de passer à autre chose pour se consacrer à ce qui nous construit. Vous arrive-t-il de vous battre jusqu’à perdre votre santé plutôt que de réagir avec des valeurs contraires face à l’obstacle dressé devant vous. Est-il pertinent d’utiliser la même chose que notre adversaire en espérant le faire changer ? Plutôt que faire plus de la même chose, surtout si cette chose est négative, utilisons son opposé. Je ne sais pas quel sera son résultat mais ça risque de nous faire beaucoup de bien.

3ème clé – Transformer les conséquences

L’avidité

Un chacal affamé en quête de nourriture, trouve un cadavre d’éléphant. Ravi il croque dans la trompe, on dirait un timon de charrue. Il croque dans les défenses dures comme de la pierre. Il croque dans les oreilles sèches comme un vieux papier… Enfin il croque dans l’arrière train, moelleux comme un gâteau. Arrivé dans le ventre une idée lui vient. « J’ai mangé à ma faim, je suis protégé du soleil, du froid ». Mais une fois installé, la peau continua son œuvre en se racornissant jusqu’à fermé l’entré. Le chacal dans le noir complet fut pris de panique, se cognant contre les parois. Il devra attendre la pluie qui ramollie la peau et laissa entrevoir une étincelle de lumière. De toutes ses forces il prit son élan et, propulsé à l’extérieur constata qu’il était devenu chauve comme un tronc. Honteux il couru dans tous les sens puis se posa et prit conscience de son avarice qui lui avait fait faire de tels choix. Jamais plus son avidité ne reprendrai le dessus.

Notre insatisfaction nous fait parfois prendre des décisions qui peuvent nous faire beaucoup de mal sur le long terme. Quel prix sommes nous prêt à payer pour réussir et être ce qui peut, pour nous, représenter le meilleur. Quel temps cela nous coûte, avons-nous abandonné nos rêves ? Avons-nous dû choisir entre amitiés sincères ou intéressées pour être à la page, ou pour obtenir ce qui nous apporte confort et sécurité ? À nous de remettre à jour nos priorités même s’il faut pour cela regarder en face les raisons de nos choix et assumer les conséquences. Car une chose est sure, il n’est jamais trop tard.

4ème clé – À l’écoute de soi

La tolérance

C’est l’histoire d’un singe malfaisant qui descendit de l’arbre sous lequel le bodhisattva, qui avait pris la forme d’un buffle puissant, se reposait à l’ombre. Le singe se jouant de lui à ses dépends s’accrochait à sa queue, sauta sur son dos, et fit ses besoins sur sa tête. Le bodhisattva qui avait cultivé amour et patience ne prêtait aucune attention à ses méfaits, malgré la répétition de ces actes. Un jour une divinité qui habitait dans l’arbre l’interpella : « Dis moi roi des buffles, comment tu supportes les actions de ce singe. Mets le à terre et écrase le avec ta corne. » Le bodhisattva répondit « Si je suis supérieur, noblesse et force et si je ne peux pas supporter les actes de ce singe, comment vais-je réaliser le vœux cher à mon cœur. Je sais cela dit que s’il fait cela à un autre buffle, il s’expose à avoir de gros soucis, mais pour ma part je souhaite être libre de tous tourments et sans culpabilité d’avoir prit la vie d’un autre. »

La patience nous met tous un jour ou l’autre à l’épreuve. Des personnes se joueront de nous et pas forcément avec l’intention de nous causer du tort. Et réciproquement en essayant d’être attentif et emphatique, nos remarques peuvent blesser. Étant motarde, au début j’avais toujours envie de doubler les voitures ralentissant comme pour me priver de ma liberté. Puis après une chute sans gravité j’ai prit le partie qu’un obstacle n’est pas forcément là pour me titiller ou me freiner, mais plutôt pour me ramener à la raison. On ne peut pas se jouer des autres ou faire ce que l’on veut sans se soucier des conséquences. Tôt ou tard on risque d’en payer le prix.

5ème Clé – Rassembler nos valeurs

La concordance

Cette fois ci le bodhisattva prit naissance sous la forme d’une caille. Un chasseur très organisé imitait leur chant. Quand il était assez prêt, jetait son filet puis resserrait les bords afin de les emprisonner. Il vendait ensuite ses proies. Un matin le bodhisattva les rassembla puis leur proposa une technique grâce à laquelle le chasseur ne pourra pas les attraper. « Quand il aura jeté son filet vous mettez chacune votre tête entre les mailles puis ensemble vous vous envolerez puis vous vous poserez dans un buisson épineux, et alors vous n’aurez plus qu’à vous dégager. Les mailles resteront dans les épines. » Toutes les cailles étaient d’accord. Le lendemain et les jours qui suivirent le chasseur rentra chez lui les mains vides. Sa femme, agacée, lui dit « as-tu donc un autre foyer à entretenir ? » « non » lui dit-il « le problème c’est qu’elle se sont entendues entre elles mais elles finiront par se chamailler et je les captureraient à nouveau ». Quelques jours après une caille perdit l’équilibre et marcha sur la tête d’une autre. « Qui ose me marcher dessus » « c’est moi désolée, ne soit pas fâchée, je n’ai pas fait exprès ». Cela ne suffisait pas et l’émeute s’étendit au groupe. Le bodhisattva décida de partir avec toute ses cailles et laissa derrière lui les cailles querelleuses. Cela arriva en cherchant qui avait fait quoi. La dernière fois hélas le filet ne put pas cette fois s’envoler et le chasseur pu rentrer chez lui avec sa prise.

La cohésion peut nous permettre d’aller ensemble dans la même direction. Certes cela nous a permis de faire beaucoup de choses, mais n’oublions pas que nous dépendons de la biodiversité. Le règne animal, le règne végétal et le règne microbien agissent comme des filtres protecteurs pour notre environnement. Notre prise de conscience sur la fin de la période d’abondance de la révolution industrielle est aussi à l’origine d’un repli sur soi et du développement d’un égocentrisme. Nous faisons partie de cette biodiversité, à nous de continuer à œuvrer ensemble avec cohérence pour arrêter cette tendance à l’individualisme.

6ème Clé – Forger ses convictions

Le courage

Il y a fort longtemps le bodhisattva fut conçu cette fois dans le sein d’une caille. Il n’était pas plus gros qu’une petite boule. Et Comme chaque année dans cette région le feu dévastait les nids. À son approche les oiseaux s’envolèrent ainsi que les parents du bodhisattva. L’oisillon seul blotti dans son nid était terrorisé par la mort, il était seul sans parents et sans protection, sans abris. Il eu une révélation : « Le pouvoir de la vertu existe en ce monde, des êtres sont devenus totalement éveillés. Ils cultivaient un amour bienveillant envers tout les êtres. De toute évidence cette vérité existe, me rappelant les vérité du passé et gardant à l’esprit le pouvoir des vertus qu’ils ont acquise, il me faut transcender la vérité de ma condition ». Il du accomplir une déclaration solennelle afin de sauver les autres et arrêter le feu. Ayant alors porté toute son attention sur ce pouvoir, il dit : « Mes ailes ne peuvent pas voler, mes pattes ne peuvent pas trotter, mes parents sont partis, ô feu retourne en arrière ». Le feu ne pu s’étendre, telle une torche plongée dans l’eau il s’éteignit à cet instant.

Ce n’est pas sans émotion que j’ai découvert ce conte plein de sagesse et d’espoir. Nous pourrions nous considérer comme un être fragile n’ayant pas la force physique de faire face à la violence. Mais il ne s’agit pas dans ce conte de force physique mais bien de force de conviction. Ce feu de forêt symbolise les situations difficiles que nous rencontrons. Nous nous sentons seuls parfois et aimerions avoir à nos côtés les êtres qui nous sont chers ou cette figure d’autorité rassurante qui nous montre le chemin. Ce feu serait un creuset dans lequel nous forgeons nos convictions, dans lequel nous trouvons nos solutions, faisant table rase des solutions et moyens utilisés auparavant. Il ne s’agit pas de répéter une recette mais de trouver la sienne. Cet oisillon si vulnérable nous représente tous face aux événements qui parfois nous dépassent et nous demandent d’aller chercher en nous-même une vérité et non une répétition. Ce conte peut sembler naïf de prime abord, mais c’est une façon bienveillante d’aller de l’avant pour transmettre un message de force et de transformation de soi face à l’obstacle et du monde autour de nous.