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Ai Weiwei : un artiste de la protestation face à l’oppression

Un artiste, une anecdote sur Ai Weiwei, l’artiste contemporain activiste des droits de l’homme.

Ai Weiwei voit le jour en 1957 à Beijing, la capitale de la Chine. Son père Ai Qing est un poète et intellectuel. Lors de la campagne des Cent Fleurs en raison de ses critiques, le régime le désigne en 1958 comme « droitiste ». À peine âgé d’un an, Ai Weiwei et sa famille sont déplacés dans plusieurs camps de rééducation à travers des provinces reculées de la Chine. L’artiste se souvient de son enfance marquée par le manque et la faim. La famille y demeure pendant la Révolution culturelle. Le gouvernement s’efforce durant cette période d’imposer l’idéologie prolétarienne en éliminant l’idéologie bourgeoise.

Son père est réhabilité à Beijing en 1978. Il cofonde alors le groupe artistique d’avant-garde Xing Xing, «  Les Étoiles », qui défend la liberté artistique. Ce sera déterminant dans l’émergence de l’art contemporain en Chine. Ce groupe remet en question les normes artistiques traditionnelles et s’engage dans des explorations créatives novatrices. Cela a constitué le point de départ de la carrière d’artiste internationale d’Ai Weiwei. Cet artiste à des talents variés : sculpteur, performeur, photographe, architecte, commissaire d’exposition et blogueur. Il a rapidement acquis une renommée en tant qu’artiste de premier plan sur la scène mondiale.

Ai Weiwei quitte le Xinjiang pour rejoindre à 21 ans l’université du cinéma de Beijing en 1979. Néanmoins, il ne supporte pas la répression politique et décide de partir à l’étranger, comme son père. Souvent désigné comme le « Andy Warhol » de Chine, l’artiste devient rapidement une figure emblématique du premier mouvement d’avant-garde chinois. Il consacre sa vie à l’art et reçoit une bourse pour New York en 1981. Il y poursuit ses études à l’École Parsons School of Design. Ai Weiwei découvre l’œuvre audacieuse et libertaire de l’artiste français Marcel Duchamp, reconnu pour sa capacité à transformer des objets banals en œuvres d’art. D’ailleurs on ne cite plus son urinoir dans le mouvement du « Ready made ».

D’abord peintre, il se tourne rapidement vers la sculpture, créant des œuvres inspirées du « Ready made ». Par exemple en 1985 « Violin », un violon dont le manche provient de la poignée d’une pelle. En 1986 l’artiste présente un cintre en fil de fer plié selon le profil de Duchamp dans « Hanging man ». Il subsiste grâce à divers petits emplois en tant que charpentier et peintre. Son appartement du East Village devient un lieu d’accueil des Chinois exilés. En 1987, Ai Weiwei cofonde l’Association des artistes chinois à l’étranger et s’implique activement dans le militantisme.

En 1989, le massacre de Tiananmen (qui signifie littéralement « Porte de la Paix céleste ») touche profondément Ai Weiwei. Il organise une marche de protestation et une grève de la faim devant le siège des Nations Unies pour défendre les droits de l’homme. La même année, il épouse Lu Qing, diplômée en gravure de l’Académie des Beaux-Arts de Beijing. Lors du cinquième anniversaire du massacre, il la photographie soulevant sa jupe devant le portrait de Mao. Ils auront un fils.

En 1993, Ai Weiwei retourne en Chine en raison de la détérioration de la santé de son père. À partir de 1994, il s’associe avec le critique Feng Boyi pour créer une série de publications clandestines appelées « Livres du drapeau rouge ». Ces publications ont une influence décisive sur le milieu artistique chinois. Ils publient des œuvres majeures comme le « Black Cover Book » en 1994, le « White Cover Book » en 1995 et le « Gray Cover Book » en 1997. Ces revues font découvrir des artistes expérimentaux à un public avide de connaissances. L’artiste Ai Weiwei réalise une œuvre iconoclaste. Elle examine la culture chinoise classique ainsi que les contradictions inhérentes à la modernité.

En 2000, en colère contre la Chine, il organise l’exposition « Fuck off ». L’artiste y présente ses études de perspective dont « Étude de perspective : Tiananmen, 1995-2003 ». Une photo montre son doigt d’honneur depuis Tian’anmen. D’autres monuments ont aussi droit à leur perspective : la tour Eiffel, ou la Maison blanche, l’Océan. Il s’affirme ainsi comme anti gouvernement chinois, anticommuniste et anti autorité.

En 2007 Ai Weiwei crée son blog qui deviendra une plate-forme d’information et d’échanges. Comme architecte il comprend la mauvaise qualité des bâtiments. Il s’implique dans une enquête après le séisme du Sichuan en 2008. Commémoration du massacre de la place Tiananmen, Tibet, police,…il s’exprime sur internet. Le gouvernement ferme son blog malgré ses 13 millions d’abonnés.

En 2008 il signe, ainsi que 300 autres artistes et intellectuels, la Charte 08. Ai Weiwei ne manquera pas de critiquer ouvertement le gouvernement chinois sur les enjeux de démocratie et de droits de l’homme. En outre, en tant qu’homme aux multiples talents, il a agi en tant que conseiller artistique pour le cabinet d’architectes Herzog & de Meuron pendant la construction du stade national de Beijing, le « Nid d’oiseau », à l’occasion des Jeux olympiques de 2008. Toutefois il appellera au boycott de ces jeux.

L’artiste présente en 2010 « Sunflower Seeds » au Tate Modern de Londres. Cette installation est constituée de millions de graines de tournesol en porcelaine. Chacune est peinte à la main par près de 1 600 artisans de Jingdezhen. L’œuvre évoque une métaphore de Mao Zedong, symbolisant l’orientation du peuple chinois vers le leader. L’installation a couvert 1 000 mètres carré et permis aux visiteurs de se déplacer sur les graines.

En 2011, l’artiste Ai Weiwei est emprisonné pendant 81 jours dans un lieu secret, où il subit des interrogatoires. Accusé de fraude fiscale par le gouvernement chinois pour justifier son arrestation, il réussit finalement à obtenir sa libération grâce aux lettres de soutien qu’il reçoit. Bien que le gouvernement cède, il est cependant privé de visa pendant cette période. À son retour, il s’amuse à démolir les murs de son atelier pour retrouver les micros qui avaient été installés durant sa détention, qu’il décide de conserver. Après quatre ans sans visa, Ai Weiwei retrouve sa compagne et son fils en Europe en 2015. En quittant la Chine vers Berlin il déclare : « Mon père, mon fils et moi avons pris la même voie en quittant notre pays natal ».

Plus que jamais, son œuvre se distingue par une critique sociale et politique percutante, mettant en lumière les injustices, les abus de pouvoir et les conflits contemporains. Ainsi l’artiste crée « Forever Bicycles » en 2014, une œuvre ludique composée de plus de 1 200 vélos, transformés en une sculpture monolithique. Cette pièce illustre sa capacité à déclasser et recontextualiser des objets du quotidien, tel que le vélo, pour aborder des thèmes sociaux et politiques. Le titre fait référence à une marque de vélo à la fois populaire et difficilement abordable dans la Chine de son enfance.

Début 2016, il réalise « Er Xi – Air de jeux », une installation artistique au Bon Marché à Paris. Pour son intervention, l’artiste s’inspire du « Shanhaijing », un livre de mythologie chinoise vieux de plus de 2000 ans, peuplé de créatures mythologiques et d’histoires de son enfance. Ses sculptures, entièrement faites à la main, utilisent la technique traditionnelle chinoise du cerf-volant. Les tiges de bambous sont taillées, courbées et assemblées pour former une structure, qui est ensuite recouverte de papier de soie blanc.

Au MuCEM de Marseille en 2018, l’artiste Ai Weiwei présente un hommage à son père Ai Qing. Ce dernier séjourne dans la ville de 1929 à 1932. Pour en témoigner, une réplique de paquebot, un poème sur la ville écrit par Ai Quing et son masque mortuaire en bronze, réalisé par l’artiste lui-même en 1996. Son œuvre témoigne de ce vécu, y compris l’humiliation subie par son père pendant son enfance. C’est ainsi qu’il expose deux savons de Marseille de 1 mètre cube chacun. Sur l’un la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et sur l’autre la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne de 1791. Une mention accompagne ces deux œuvres : « Écrites sur un savon, elles peuvent s’effacer avec l’usage, car, symboliquement, le savon est l’objet qui nettoie. Mais lave-t-il les consciences ? »

En 2019, il s’installe avec sa famille à Cambridge, tout en conservant son studio à Berlin. Finalement l’artiste s’installe au Portugal avec son fils de 11 ans. Ai Wewei se demande comment il est encore en vie et pourquoi a-t-il finalement pu quitter le pays. C’est une question à laquelle il n’a pas de réponse. Bien que ses entraves aient été moins brutales que celles de son père, le régime semble plus fort que jamais, capable de traquer et de réduire au silence n’importe quel opposant dans le monde entier. Sa survie pourrait s’expliquer par son statut : Ai Wewei est un artiste exceptionnel.

Au revoir et à bientôt pour une nouvelle anecdote !

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