Podcast: Download (Duration: 8:36 — 9.7MB)
S'inscrire au podcast via une plateforme Apple Podcasts | Spotify | Android | Deezer | RSS
Un artiste, une anecdote sur Jean-Baptiste Carpeaux, le sculpteur qui a révolutionné l’art du second empire.
Jean-Baptiste Carpeaux naît le 11 mai 1827 dans une modeste famille ouvrière à Valenciennes. Dès son plus jeune âge il manifeste un grand intérêt pour le dessin. Son père le place alors comme apprenti chez un plafonnier nommé Debaisieux qui, voyant son habileté, recommande son inscription aux Académies d’architecture, de sculpture et de peinture de Valenciennes. Malgré le souhait initial de son père, Jean-Baptiste choisit de poursuivre des études artistiques. À Valenciennes, Carpeaux développe ses compétences artistiques en suivant les cours de sculpture de René Fache et ceux d’architecture de Jean-Baptiste Bernard.
En 1838 la famille Carpeaux s’installe à Paris. Jean-Baptiste reçoit à la Petite École sa première formation en dessin et modelage, renforçant ainsi ses compétences artistiques. Il entre ensuite à l’École des Beaux-Arts de Paris en 1844 suivant l’enseignement de François Rude. Jean-Baptiste découvre durant dix mois la précision mathématique requise pour reproduire des œuvres. De même, il apprend l’utilisation d’outils comme le fil à plomb et le compas pour vérifier la justesse des sculptures.
En 1854 Jean-Baptiste Carpeaux remporte le Grand Prix de Rome avec son œuvre « Hector implorant les dieux en faveur de son fils Astyanax », après six tentatives. Son départ pour Rome est toutefois reporté pour lui permettre de terminer plusieurs commandes en cours. Avec deux ans de retard, l’artiste rejoint la Villa Médicis à Rome. Cela crée des tensions avec Victor Schnetz, le directeur de l’Académie de France. Peu enclin à suivre les règles et parfois querelleur, il peine à se plier aux exigences. Cependant, Carpeaux parvient à nouer des amitiés solides avec certains confrères, notamment l’artiste sculpteur Alexandre Falguière, avec qui il explore infatigablement Rome et ses environs.
L’Italie devient pour Carpeaux une source d’inspiration inépuisable, avec le sculpteur Michel-Ange en figure de proue, dont il admire profondément l’œuvre tout au long de sa carrière. La vie italienne lui offre en outre de nombreuses études sur le vif. En effet l’artiste passe du temps à observer et dessiner la vie dans les rues, enrichissant son style distinctif. Carpeaux développe un goût marqué pour le mouvement. Durant cette période enthousiaste, Jean-Baptiste Carpeaux entame une relation avec une jeune paysanne des monts Sabins, Barbarella Pasquarelli. Son ami d’enfance, Jean-Baptiste Foucart, le décrit comme un « maître d’art et un maître d’énergie ».
Durant son séjour, Carpeaux crée en 1858 le « Pêcheur à la coquille ». Cette œuvre lui apporte de la reconnaissance à Rome et à Paris. C’est l’œuvre de Rude « Le Pêcheur napolitain jouant avec une tortue » qui aurait inspiré cette œuvre. Présentée au Salon de 1833, cette sculpture a introduit une dimension naturaliste à une inspiration classique. Le sourire révélant les dents brave le traditionnel beau idéal et capte l’attention des partisans du classicisme et du romantisme.
En 1859, Jean-Baptiste Carpeaux termine son séjour d’artiste à l’Académie de France à Rome. Il présente « Ugolin entouré de ses quatre enfants », une œuvre controversée exposée au Musée d’Orsay à Paris. Malgré son non-respect des contraintes académiques, la sculpture exprime une exaltation douloureuse et tragique. Cette œuvre lui vaut immédiatement une grande notoriété et une place privilégiée sous le Second Empire, le rendant indispensable sur de nombreux projets.
Revenu à Paris en 1862, Carpeaux se fait connaître à la cour impériale grâce à la princesse Mathilde, cousine de l’empereur. Soutenu et encouragé par le marquis de Piennes, chambellan de l’impératrice et ami fidèle, Carpeaux est particulièrement apprécié par les souverains. L’impératrice Eugénie acquiert les deux marbres du « Pêcheur à la coquille » et de la « Jeune fille à la coquille ». Napoléon III défend le relief du « Triomphe de Flore » contre l’avis de l’architecte du pavillon de Flore, situé à une extrémité du Palais du Louvre. De plus, le couple impérial accepte la proposition de Carpeaux de réaliser le portrait du prince héritier.
Toutefois, l’artiste sculpteur Jean-Baptiste Carpeaux n’est pas officiellement leur statuaire : il ne réalise pas de portraits d’apparat des souverains pendant leur règne. Fasciné par les brillantes réceptions auxquelles il est convié, que ce soit au palais des Tuileries ou aux « Séries » de Compiègne, Carpeaux multiplie les études dessinées sur le vif ou de mémoire. Ces chroniques, très personnelles et parfois dignes de reportages, se transforment souvent en peintures, une pratique qu’il poursuit avec une grande variété, bien qu’il ne les expose pas publiquement.
En 1864, Carpeaux commence à enseigner le dessin et le modelage au prince Louis-Eugène-Napoléon. Lors de son séjour à Compiègne, il parvient à obtenir le portrait de l’héritier. La statue commencée en 1865 rompt avec les traditions. Elle représente en effet le jeune prince en costume civil, accompagné de son chien, Néro. Convaincu de son importance, Carpeaux espère que l’œuvre marquera son époque.
« Ma statue du prince impérial sera une belle empreinte des temps modernes pour l’avenir, j’y mets tout mon savoir, toute ma vie ; ce sera un échelon de ma gloire. » Jean-Baptiste Carpeaux
La statue connaissant un grand succès, les droits des répliques sont alors rachetés par la maison impériale. En 1868, Carpeaux réalise une version en bronze argenté pour l’Hôtel de Ville de Paris, mais celle-ci est détruite lors de l’incendie de 1871.
En 1869, Jean-Baptiste Carpeaux fait la connaissance d’Amélie de Montfort aux Tuileries. Ils se marient en avril et auront trois enfants, dont l’explorateur Charles Carpeaux. En mai, Carpeaux expose le buste de Charles Garnier au Salon et termine le plâtre de Watteau. L’artiste achève « La Danse » pour l’Opéra Garnier, dont le réalisme audacieux et la nudité des personnages provoque la controverse. Lors de la nuit du 26 au 27 août, une attaque à l’encre endommage la sculpture. L’empereur était sur le point de signer le retrait de l’œuvre mais la guerre franco-allemande de 1870 éclata, la sculpture resta ainsi en place.
Après la guerre, Carpeaux retourne à Paris et met en place un atelier d’édition dans le but d’améliorer sa situation financière. Il réalise les Bacchantes aux lauriers, aux vignes et aux roses, de nouveaux bustes par ailleurs inspirés de « La Danse ». « La Bacchante aux roses n°2 » également appelée « La Rieuse » capture un bref instant de rire d’une actrice, Mademoiselle Miette. Mais les commandes diminuent. A cours d’argent, il doit confier la gestion de son atelier à son frère. Sa jalousie excessive mène à sa séparation d’avec Amélie en 1874. Elle demandera une séparation de biens à cause des dettes et du départ de son mari du domicile conjugal.
Jean-Baptiste Carpeaux, décède le 12 octobre 1875 des suites d’un cancer de la vessie, il a quarante-huit ans. Ses obsèques se sont déroulées à Courbevoie en présence de plus de 2000 personnes avant son inhumation à Valenciennes, sa ville natale. L’artiste a légué plusieurs de ses œuvres au musée des Beaux-Arts de la ville.
Jean Baptiste Carpeaux aura véritablement redéfini le rôle de l’artiste sculpteur. Il aura mis en avant l’importance du processus créatif, y compris l’hésitation et l’expérimentation avec des matériaux comme la terre et le plâtre. L’artiste démontre ainsi que la création pouvait précéder la réflexion. En rompant avec les traditions, il a intégré des styles et techniques variés dans son travail, défiant les conventions établies. Son approche novatrice a apporté un souffle nouveau à la sculpture, laissant un impact durable.
Au revoir et à bientôt pour une nouvelle anecdote !