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Un artiste, une anecdote sur Charles Cordier, sculpteur du 19ème siècle qui a utilisé la couleur pour combattre les préjugés de son époque.
Charles Henri Joseph Cordier est né en 1827 à Cambrai. Fils de pharmacien, il entre à l’école des Beaux-Arts de Paris en 1846. Il rejoint la même année l’atelier de son maître François Rude. Sa rencontre avec Seïd Enkess, un ancien esclave devenu modèle, en 1847, marque un tournant dans sa carrière. Il lui inspire son grand projet : représenter la diversité humaine, axé sur la lutte contre l’esclavage.
En 1848, année de l’abolition de l’esclavage en France, le sculpteur Charles Cordier se fait remarquer en exposant une série d’oeuvres colorées d’orientalistes. Notamment le buste « Saïd Abdallah, de la tribu de Mayac, Royaume de Darfour ». Ces bustes rencontrent un grand succès. Il devient ensuite rapidement célèbre et fréquente les cercles scientifiques parisiens. En 1851, il obtient la commande de bustes pour la galerie d’anthropologie du Muséum d’histoire naturelle. Il est soutenu par Constant Duméril alors président de l’Académie des sciences. L’État français achète en 1851 le groupe de sculptures de Saïd Abdallah et de la « Vénus Africaine ». La reine Victoria commandera également un exemplaire de chaque œuvre.
L’anthropologie devient une discipline importante grâce à des figures telles que Paul Broca et Armand de Quatrefages. La galerie d’anthropologie du musée d’histoire naturelle, ouverte en 1855, est une occasion pour le sculpteur de donner une représentation artistique et scientifique de la diversité humaine avec ses oeuvres. Il s’inscrit dans le mouvement émergent de l’ethnographie, renforcé par les idéaux abolitionnistes et de défense des libertés de l’époque. Il voyage ensuite en Algérie, en Grèce et en Égypte grâce à des bourses gouvernementales.
En 1856, Cordier continue ses voyages pour trouver des modèles pour sa collection ethnographique. Il préfère observer et synthétiser au lieu d’utiliser des moulages sur nature. Il explore la polychromie avec des patines et divers matériaux pour créer des rendus somptueux. Au Salon de 1857, Cordier présente 18 bustes et utilise pour la première fois l’association de marbre, onyx et bronze avec « L’homme du Soudan en costume algérien », l’une de ses premières sculptures polychromique. Napoléon III acquiert cette œuvre, aujourd’hui exposée au musée d’Orsay à Paris.
En 1862 il défend l’idée de l’ubiquité de la beauté, affirmant que chaque race possède sa propre beauté distincte. Il souligne également que la règle du Beau idéal n’est ni résolue ni fixe, car chaque race présente des différences.
« Le plus beau nègre n’est pas celui qui nous ressemble le plus, ce n’est pas davantage celui qui présente au degré le plus prononcé, les caractères qui distinguent sa race de la nôtre. C’est celui qui réunit en lui des formes, des traits et une physionomie où se reflètent, en un équilibre harmonique, les caractères essentiels, moraux et intellectuels de la race éthiopienne »
Charles Cordier
Une idée novatrice à l’époque au 19ème siècle. Pourtant la vision de Cordier sera dépassée par une nouvelle conception de l’anthropologie physique qui intègre les aspects culturels et linguistiques des peuples étudiés, en se basant sur d’autres disciplines telles que l’archéologie. Ainsi, son travail perd son caractère scientifique dès 1865.
Il exécute en 1867 un groupe en bronze intitulé « L’Abolition de l’esclavage » exposé au musée du Nouveau Monde à la Rochelle. Ce musée aborde le passé négrier de cet ancien port du commerce triangulaire vers les Antilles.
Charles Cordier aura contribué à des projets majeurs à Paris, tels que le palais du Louvre, l’opéra Garnier et l’Hôtel de ville, et a réalisé des monuments tels que le Monument au maréchal Gérard à Verdun et le Monument à Ibrahim Pacha au Caire. Son travail s’étend également à l’international.
Après sa séparation avec sa femme, Charles Cordier vend sa villa « Arabe » d’Orsay et sa villa « Mauresque » de Nice. Il s’installe ensuite à Alger où il décède en 1905 dans un modeste pavillon loué dans les hauteurs de la ville.
Le sculpteur Charles Cordier, souvent négligé au 20ème siècle, joue un rôle essentiel en tant qu’historien, anthropologue et artiste dans la représentation de la diversité humaine. Son travail en tant que sculpteur majeur mérite une reconnaissance dans l’histoire de l’art.
À bientôt pour une nouvelle anecdote !