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Christian Boltanski : un artiste de la mémoire

Un artiste, une anecdote sur Christian Boltanski, dans une quête émotionnelle de la vie, la mort et de la disparition.


L’artiste français Christian Boltanski naît à Paris en 1944. Son père, Étienne, est issu de parents russes juifs ayant émigré en France, devenu médecin et converti au catholicisme en 1927. Marie-Elise, la mère de Christian, d’origine corse vient d’une famille de juifs ukrainiens. Élevée par une marraine aisée sans enfants, elle est rebaptisée Myriam et étudie la médecine après le décès de sa tutrice. Étienne et Marie-Elise/Myriam se marient en 1929 et ont 4 enfants. Pendant l’occupation, Étienne doit porter l’étoile jaune et perd son emploi. Pour le protéger, Myriam organise une cachette sous les escaliers de leur maison. Ils simulent un divorce, Étienne vit alors caché chez lui pendant toute la guerre, sortant rarement. Ils se remarient en 1946. C’est donc dans ce contexte que Christian vient au monde.

La famille Boltanski, marquée par l’expérience de la guerre, fonctionne de manière unique. Myriam prend en charge l’éducation de ses enfants à la maison, les faisant peu fréquenter l’école. Ils vivent tous dans la même pièce, se déplacent dans une seule voiture et dorment autour du lit de leur mère. La famille a un mode de vie simple, basé sur la solidarité et la peur. Christian ne sortira seul pour la première fois qu’à l’âge de 20 ans.

À 14 ans, Christian Boltanski quitte l’école sans formation artistique et se lance dans la peinture. Il explore ensuite l’écriture, la sculpture, la photographie, le cinéma et l’installation. Son objectif principal est de susciter des émotions chez le spectateur. Il appartient au courant artistique du Narrative Art et a initialement exercé en tant que peintre avant de se consacrer à l’installation à partir de 1976.

L’influence de la seconde guerre mondiale, lui fait intégrer dans son travail des éléments tirés de sa propre expérience. Sa biographie, réelle ou imaginaire, devient le sujet central de son œuvre dès ses débuts. Par la suite, ses créations abordent principalement des thèmes tels que la mort, la mémoire, le hasard, le souvenir et l’absence.

Dans sa biographie de 1984, Christian Boltanski décrit sa transition artistique : il passe de la peinture en 1958 à la photographie en noir et blanc. Sa première exposition personnelle se tiendra au Théâtre Le Ranelagh en mai 1968. Des marionnettes et un film mettent en avant la misère, la vieillesse, la solitude et la mort. En 1971, Boltanski crée l’installation intitulée « L’Album de la famille D. 1939-1964 ».

À partir des années 1990, Christian Boltanski, qui cherche incessamment à revisiter son enfance, aborde davantage les thèmes du passé et de la fugacité. Il contribue à mettre en place les « Archives des députés allemands » au palais du Reichstag en 1999, et participe à l’exposition décentralisée Einstein-Spaces organisée par le Forum Einstein à Potsdam en 2005.

L’artiste présente la même année « Le Cœur », un autoportrait original. Au lieu de représenter son visage, il utilise une ampoule clignotant en synchronisation avec ses battements cardiaques. Cette idée, symbolique du cœur qui bat, devient une constante dans le travail de l’artiste.

Quelques années après en 2008, Boltanski présente à nouveau son autoportrait. Il est cette fois inclus dans un dispositif, «  Les Archives du Cœur », permettant aux visiteurs d’enregistrer leurs propres battements de cœur. Chaque battement étant unique, il reflète la diversité des individus. Il explore ainsi la mémoire individuelle et la disparition. Sur l’île de Teshima au Japon se trouve la cabane qui abrite « Les Archives du Cœur ». Les visiteurs peuvent écouter ces battements et sont invités à ajouter les leurs à la collection s’ils le désirent. Ce sont près de 140 000 battements de cœur symbolisant aussi la fragilité de la vie. Parmi eux, certains ne battent peut-être déjà plus aujourd’hui…

Lors de l’exposition Monumenta au Grand Palais en 2010, Christian Boltanski présente « Personnes ». Le titre de cette œuvre évoque à la fois l’absence et l’anonymat des individus dans la masse. Pourtant chacun devient égal dans sa disparition. Cette installation visuelle et sonore occupe toute la nef et utilise plusieurs éléments. Tout d’abord un grand mur de 42 m de long et de 3,90m de haut fait de boîtes à biscuits rouillées. Chacune des boîtes, numérotée, évoque le passage du temps et les souvenirs du passé. Ces boîtes, semblables mais chargées d’émotion, suggèrent à la fois l’anonymat de la masse et la mémoire des disparus. Ensuite des rectangles de vêtements alignés au sol évoquent un cimetière ou un camp d’extermination, où les vêtements portés par le passé témoignent de la présence humaine disparue. Puis une grue extrait des vêtements d’une pyramide amoncelée, semblant leur redonner vie l’espace d’un instant.

Christian Boltanski évoque la fatalité de « la destinée » au travers de cette installation, rappelant bien sur les horreurs de la Shoah, mais aussi la condition humaine universelle. Boltanski plonge le spectateur dans un environnement austère et militaire, contrôlé par une lumière froide et raide. Deux sources lumineuses distinctes symbolisent la dualité entre l’individu et l’anonymat. L’artiste a choisi que l’exposition se déroule en hiver et a délibérément exclu le chauffage pour ainsi renforcer l’atmosphère de l’œuvre. Il souhaite que le visiteur soit physiquement et psychiquement intégré dans celle-ci. Il suscite alors des émotions fortes en le poussant à s’interroger.

Christian Boltanski et l’artiste plasticienne Annette Messager étaient mariés jusqu’à son décès à Paris en 2021, à l’âge de 76 ans, des suites d’une leucémie foudroyante. Ils se sont rencontrés peu après la Biennale de Paris de 1969 et ont choisi de ne pas avoir d’enfants. Ils ont résidé à Malakoff, dans un bâtiment industriel transformé en logements d’artistes où se trouvait son atelier.

Christian Boltanski expose sa conception artistique axée sur des thèmes simples et universels, accessibles à tous, lors d’une interview. Cliquez ici pour y accéder sur Youtube. Il souligne que c’est le spectateur, en se connectant à son propre passé, qui donne ainsi vie à l’œuvre.

Au revoir et à bientôt pour une nouvelle anecdote !

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