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L’art de la géométrie dans la sculpture contemporaine

La présence constante de la géométrie dans notre quotidien la rend quasi invisible. Son influence se fait pourtant ressentir. La géométrie inspire l’artiste et façonne notre environnement depuis des millénaires. La sculpture géométrique est ancrée dans la nature et explorée par l’homme depuis l’Antiquité. Hérodote voyait déjà en elle une force presque mystique.

Partout autour de nous, la nature brille de splendeurs géométriques. Ainsi les cercles parfaits créés par une pierre jetée dans l’eau. De même les motifs cristallins complexes, ou encore les époustouflantes colonnes hexagonales de la Chaussée des Géants en Irlande du Nord. L’esthétique de la géométrie séduit également en architecture. Nous pouvons admirer les rosaces de la cathédrale de Strasbourg ainsi que des bâtiments modernes. Par exemple la ville de Sun City en Arizona, conçue autour d’un plan circulaire.

Dans l’art, la géométrie s’exprime de manière audacieuse avec le cubisme de Picasso. Citons également les illusions saisissantes de M.C. Escher. Elles jouent avec les perspectives et les propriétés géométriques pour créer des mondes oniriques. D’ailleurs son œuvre « Relativity » est un magnifique exemple de ce jeu entre formes et perceptions.

En sculpture, Antony Gormley utilise des formes géométriques pour créer des expériences immersives. Buren examine la relation entre le corps humain et l’espace. Richard Perry fusionne géométrie et matériaux organiques pour réaliser des sculptures qui dialoguent avec leur environnement. Donald Judd célèbre le minimalisme à travers des arrangements géométriques précis. Richard Serra de son côté utilise l’acier pour transformer notre perception de l’espace. Miguel Chevalier mêle art et technologie avec des sculptures pixelisées qui interrogent la frontière entre l’art traditionnel et l’ère numérique.

Ensemble, ces artistes transforment alors la sculpture en une expérience géométrique enrichissante et interactive. Ils repoussent ainsi les limites de notre perception de l’art et de l’espace.

Constantin Brancusi : une sculpture géométrique épurée

La sculpture géométrique explorée par Constantin Brancusi, remet en question les frontières traditionnelles entre l’œuvre et son socle. La hiérarchie entre ce qui est perçu comme haut et bas, vertical et horizontal se trouve également questionnée. Brancusi a transformé le socle en un élément artistique à part entière. Souvent monumental et géométrique il brouille nos perceptions de l’œuvre d’art. Ses créations, comme la « Colonne sans fin » et la « Porte du Baiser », témoignent de son ambition monumentale et de sa capacité à simplifier les formes au fil du temps.

En s’inspirant de l’artisanat de sa Roumanie natale, il a intégré des motifs de l’Art Nouveau. Il est toutefois resté fidèle à une esthétique géométrique épurée. Brancusi a façonné un langage visuel basé sur la simplification et l’intégration de l’ornement dans la structure, aligné avec une quête formelle authentique et des connexions culturelles profondes.

Daniel Buren : la géométrie des perceptions

Le sculpteur Daniel Buren est connu pour ses bandes verticales rayées qu’il considère comme un « outil visuel » permettant de transformer et de dynamiser l’espace. Par exemple les « Deux Plateaux » plus connues sous le nom de « Colonnes de Buren » à Paris en 1986. À Nantes l’artiste crée « Les anneaux » dans le cadre de l’édition 2007 du Voyage à Nantes. En jouant avec les couleurs et la lumière, il modifie constamment la perception que l’on a de ses installations. L’artiste encourage le public à se déplacer autour de ses œuvres. Il peut ainsi changer sa perception et découvrir de nouvelles perspectives.

Dans son exposition de 2010 « Quand les Carrés font des Cercles et des Triangles : Hauts-reliefs situés », Buren réinvente l’espace à travers des formes simples qui se croisent et se transforment. Il utilise des motifs comme des carrés, cercles et triangles afin de créer des œuvres colorées et vivantes. Son travail s’inspire de ses créations des années 1960 et 1970. Il explorait alors déjà les motifs répétitifs pour favoriser une interaction entre l’art, l’architecture et le spectateur.

Ainsi, Daniel Buren propose une expérience artistique interactive où formes, couleurs et lumière dialoguent avec le lieu qui les accueille et les spectateurs qui s’y aventurent. L’artiste renouvelle ainsi sans cesse la relation entre ces éléments.

Antony Gormley : géométrie de l’espace et de l’humain

Le travail de Antony Gormley explore profondément la relation entre le corps humain et l’espace environnant. L’artiste joue souvent sur la perception et l’expérience physique du spectateur. Gormley a suivi des études en archéologie et en anthropologie. Il a également séjourné en Inde, enrichissant son approche artistique d’une dimension culturelle large. Ces expériences se traduisent par une compréhension unique des structures sociales et des espaces sacrés. Son approche est fortement influencée par la géométrie euclidienne et les systèmes cristallins. Cela simplifie et abstractise la forme humaine tout en explorant des concepts complexes comme la dualité entre solidité et éphémérité.

Ainsi sa série « Memes » l’artiste recompose des postures du corps grâce à des formes géométriques simplifiées. Cela ajoute une dimension introspective en reflétant divers états d’esprit. Voilà qui invite les visiteurs à une réflexion personnelle sur leur propre existence et leur place dans le monde. L’ensemble de ces œuvres transforme l’environnement de la galerie en un espace qui encourage l’interaction et la contemplation, poussant les limites de l’art comme expérience sensorielle et intellectuelle.

Des expériences immersives

Dans l’exposition « For the time being », Gormley utilise des formes géométriques épurées pour plonger le visiteur dans une expérience immersive qui va au-delà de la simple observation. Les sculptures comme « Clutch II » et « Clutch VI » manipulent l’échelle et la matière pour altérer notre perception de l’espace.

L’installation « Expansion field » propose une expérience quasi ludique et déstabilisante. Inspirée par le numérique et les formes cubiques, elle rappelle des environnements virtuels comme ceux de « Minecraft ». Ce contraste entre le tangible de ces menhirs pixelisés en fonte d’acier et l’abstraction de l’installation souligne le jeu constant de Gormley entre matérialité et immatérialité.

Gormley présente ses sculptures dans des lieux inattendus, comme les plages de Liverpool ou sur des toits à Paris. L’artiste réussi ainsi à ancrer ses œuvres dans le quotidien des spectateurs. L’art se transforme en une expérience immersive et accessible, et rappelle à chacun notre connexion intrinsèque avec notre environnement.

Donald Judd : minimalisme et fonctionnalité dans la sculpture géométrique

Connu pour ses meubles aux formes géométriques et épurées, Judd a su conjuguer art minimaliste et fonctionnalité. Ses créations en bois autrefois sous-estimées par le milieu artistique, connaissent aujourd’hui un regain d’intérêt. Cela souligne un attrait contemporain pour la simplicité. Judd interprète le minimalisme par une esthétique alliant formes géométriques simples et agencement rigoureux.

Après la publication de son manifeste « Specific Objects » en 1965, il gagne en notoriété. Sa série « Stacks » joue subtilement avec les notions de plein et de vide, forgeant ainsi une dynamique visuelle singulière. L’artiste fixe au mur des éléments rectangulaires identiques placés à distances égales les uns des autres.

En se détachant de la sculpture et de la peinture traditionnelles, ses œuvres, dominées par des volumes tridimensionnels et des couleurs industrielles, explorent la pure matérialité. Loin de tout illusionnisme, Judd s’intéresse à la matérialité tangible et évite l’expression personnelle. Ses œuvres sont souvent basées sur des progressions mathématiques, comme la suite de Fibonacci, soulignant une lecture calculée et précise de l’espace.

Attachant une grande importance à la mise en espace, Judd a acquis plusieurs bâtiments à Marfa pour y réaliser des expérimentations in situ, intégrant inextricablement l’œuvre et son environnement.

Bien que fréquemment qualifié de théoricien du minimalisme, Judd préférait les termes « d’objets spécifiques » et de « boîtes colorées », se démarquant des classifications traditionnelles. Sa démarche épure la perception visuelle et étudie la relation essentielle entre l’œuvre, l’espace et le spectateur, offrant une nouvelle perspective sur l’interaction entre design fonctionnel et art contemporain.

Richard Perry : sculpture géométrique organique

L’œuvre de Richard Perry se distingue par son approche innovante qui marie formes géométriques et matières organiques. Artiste britannique de Nottingham formé en arts plastiques à l’Université Polytechnique de Leeds, Perry développe une démarche artistique qui allie intuition et planification. Il crée ainsi des sculptures dialoguant harmonieusement avec l’espace et la lumière. Dès son enfance, sa passion pour l’observation de la nature cultive chez lui un sens aigu des couleurs et de la perception.

Dans le travail de Richard Perry, la matière et la forme occupent une place centrale. Ses sculptures monumentales et destinées à l’espace public, utilisent des matériaux variés tels que le bronze, l’ardoise, et le marbre. L’artiste s’intéresse particulièrement à la pierre, explorant ses qualités et son potentiel de transformation par la lumière. Perry choisit minutieusement les pierres, en fonction de leur origine géographique, pour établir un lien intime avec le lieu.

Bien que la sculpture soit au cœur de sa pratique, Perry continue d’explorer le dessin et la peinture, non pas comme étapes préparatoires, mais comme moyens d’élargir son langage visuel et d’expérimenter librement. Il aborde sa création sculpturale avec la sensibilité d’un peintre, ce qui lui permet de repousser les limites traditionnelles des formes artistiques.

Son processus de création est dépourvu de modèle ou de dessin initial. Cela illustre ainsi une tension entre préméditation et intuition que l’artiste compare à une partie d’échecs. Ce n’est que lorsque la sculpture acquiert sa propre identité et parvient à le surprendre que l’œuvre est considérée comme achevée. Le travail de Richard Perry révèle une quête perpétuelle d’innovation, témoignant d’un dialogue continu entre l’art et le monde environnant.

Richard Serra : interroger l’espace avec la sculpture géométrique monumentale

Richard Serra, sculpteur américain de renom, a marqué l’histoire de l’art par ses imposantes sculptures en acier qui interrogent notre perception de l’espace et du temps. Parmi ses créations les plus célèbres, on compte « Tilted Arc » en 1981. Cette œuvre a suscité la controverse à New York en raison de son impact sur l’espace public et son influence sur le comportement des passants. Elle a révélé des tensions entre expression artistique et acceptation publique. Son œuvre « La Matière du temps », présentée à Bilbao, offre une expérience immersive unique où le spectateur est invité à traverser et interagir physiquement avec l’art.

Avec son approche innovante et réflexive, Serra a transformé l’acier en un matériau flexible et dynamique, capable d’éveiller une relation intime et personnelle avec le spectateur. Il aspire à ce que ses œuvres ne soient pas seulement esthétiques, mais aussi des expériences enrichissantes qui transforment notre perception et nos émotions.

Découvrez cet artiste avec l’anecdote et podcast : « Richard Serra : espace, métal et perception dans l’art monumental ».

Miguel Chevalier : sculpture géométrique numérique et immersive

L’artiste Miguel Chevalier réussit à transformer l’expérience visuelle en une odyssée sensorielle inédite. Dans ses créations l’artiste explore des thèmes tels que les réseaux, la fragmentation, l’urbanisme, le virtuel. En 2024, le Grand Palais Immersif à Paris accueille l’artiste dans l’exposition « Pixels ». Les spectateurs plongent dans un univers numérique génératif. Une proposition de réflexion sur notre interaction quotidienne avec la technologie. L’exposition transforme ainsi l’espace en un paysage vivant de couleurs et de formes en mouvement. Les installations utilisent la lumière et les projections, créant alors des environnements dynamiques qui réagissent aux mouvements des visiteurs. L’artiste renforce ainsi le message de chevauchement entre le numérique et le physique.

En 2024 l’artiste crée « Magic Dragon », une œuvre lumineuse et monumentale de 55 mètres réalisée pour le 4e anniversaire du centre commercial IconSiam à Bangkok en Thaïlande. Elle offre une expérience sensorielle unique pour marquer le Nouvel An chinois. La tête du dragon en représentation filaire typique des logiciels de 3D est suivie par un corps composé de 38 écrans-vertèbres pivotants. Une installation numérique interactive s’anime selon les mouvements des visiteurs qui traversent ce tunnel de lumière. Cette sculpture lumineuse et dynamique place le mouvement et l’illusion d’optique au cœur de l’expérience. Elle s’inscrit dans la lignée de l’art cinétique et optique.

En expérimentant avec des algorithmes et la programmation informatique, Miguel Chevalier crée des paysages fluides et changeants. Ils ne sont pas sans rappeler la nature tout en demeurant profondément ancrés dans le monde technologique. Chaque œuvre offre une réflexion sur la nature de la technologie moderne et son influence sur notre perception du réel.

Sculpture géométrique et perception de la forme

En conclusion, la géométrie, omniprésente et intemporelle, transforme notre perception artistique et spatiale. À travers les œuvres de sculpteurs contemporains, elle révèle sa capacité à transcender les simples formes mathématiques pour devenir un langage artistique puissant et dynamique.

La relation entre le corps humain et l’espace se questionne grâce à des installations géométriques immersives. Notre perception de l’art et des lieux qu’il investit se transforme, invitant à un dialogue. Formes géométriques et matériaux naturels, créent des œuvres monumentales qui fusionnent harmonieusement avec leur environnement.

L’art géométrique ne se limite pas aux structures statiques. Technologie et interactivité, proposent des expériences immersivesl’art s’anime et réagit aux mouvements des spectateurs. Cette interaction entre numérique et physique ouvre de nouvelles voies d’expression et d’exploration.

Au milieu de toutes ces innovations artistiques, chaque artiste contribue à enrichir notre compréhension de la géométrie en tant que langage universel et intemporel. Au-delà des formes apparentes, ces œuvres révèlent une réalité plus profonde, celle de notre relation à l’espace et au monde. La géométrie, autrefois vue comme une simple discipline mathématique, se dévoile ainsi comme une clé d’exploration continue de l’art et de l’humanité.

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