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L’artiste Kara Walker fait la lumière sur les ombres de l’esclavage

Une artiste, une anecdote sur Kara Walker artiste engagée qui plonge dans les racines douloureuses de l’histoire raciale américaine.

Kara Walker nait le 26 novembre 1969 à Stockton en Californie. Elle est la fille de Larry Walker artiste et directeur du département artistique à l’université du Pacifique. Elle développe ses talents artistiques dès son enfance. Kara explore les thématiques de la race dès treize ans, après un déménagement à Stone Mountain. Cette ville située près d’Atlanta en Géorgie était alors marquée par l’histoire du Ku Klux Klan et l’héritage des lois Jim Crow. La ségrégation raciale dans les établissements publics et privés ont de fait engendré des inégalités flagrantes. L’accès aux ressources et opportunités éducatives pour les enfants afro-américains était effectivement très limité. L’artiste se libère alors des stéréotypes raciaux et de genre dominants de l’époque pour explorer sa propre voie artistique.

Après ses études à l’Atlanta College of Art en 1991, elle est diplômée du MFA à la Rhode Island School of Design en 1994. À seulement 28 ans, Kara Walker est déjà une figure incontournable de la scène artistique. Elle crée « Gone: An Historical Romance of a Civil War as It Occurred b’tween the Dusky Thighs of One Young Negress and Her Heart » une œuvre provocante. Pour la réaliser, elle utilise des silhouettes pour aborder les sujets de l’esclavage, de la violence et du sexe.

L’artiste crée des œuvres d’art surdimensionnées, souvent très politiques. Son travail a été loué pour son impact social et la manière dont il aborde des questions difficiles, problèmes raciaux, sexualité, violence. Exposée dans de nombreux musées et galeries à travers le monde, elle reçoit de nombreux prix prestigieux. En explorant les questions de race, de genre et de pouvoir, elle pousse ainsi le spectateur à réfléchir sur les injustices de notre société. Elle emmène à la réflexion sur l’histoire complexe et douloureuse de l’Amérique. Cela continue de susciter des débats et des réflexions profondes dans le monde de l’art contemporain.

Kara Walker défend son intention artistique de provoquer ce questionnement et cette réflexion. Son travail artistique, étroitement lié à son identité noire, aborde de manière franche et sans détour les douloureux héritages du racisme et du sexisme dans l’histoire américaine. Mais ses œuvres parfois vues comme dégradantes et pornographiques subissent la critique d’artistes afro-américains. La controverse a mis en lumière la question de la réutilisation des stéréotypes racistes dans l’art contemporain. Pourtant certains artistes comme Betye Saar ont également subverti ces stéréotypes pour dénoncer l’oppression raciale.

Kara Walker a ouvert la voie à une nouvelle approche d’artiste débarrassée des contraintes identitaires. Dans son travail artistique, elle déconstruit les stéréotypes racistes en exposant leur origine fictive. En outre elle présente à la lumière la paranoïa du dominant. Ses œuvres mettent en scène la violence raciste et sexiste pour révéler la confusion entre bourreau et victime. De même elles soulignent la perpétuation de la violence historique et contemporaine.

En 2006, elle présente une exposition au Metropolitan Museum of Art de New York sur le cyclone Katrina. En 2007 une rétrospective de ses œuvres provocantes sur les clichés des Africains a lieu, présentée par le musée d’Art moderne de la ville de Paris. Elle a également représenté les États-Unis lors de biennales internationales. Toujours en 2007 le Times Magazine la voit comme l’une des artistes les plus influentes au monde.

Son œuvre, inscrit dans l’art afro-américain du 20ème et du 21ème siècles, propose une réflexion sur la représentation de la violence historique. Kara Walker utilise l’irrévérence et l’esthétisation de la violence raciste pour mettre en lumière les atrocités subies par les Noirs dans l’histoire américaine. Sa pratique artistique remet en question le concept de progrès moral de l’histoire. Elle expose la répétition de la violence au fil du temps. En détournant les caricatures racistes, elle expose la conscience raciste paranoïaque et attire le spectateur dans un piège visuel. Ainsi elle remet en question les institutions culturelles américaines et européennes.

L’image de la silhouette dans l’œuvre de Walker met en lumière la violence institutionnalisée de l’esclavage. Elle modifie la fonction du dessin qui sépare et délimite. Les scènes de violence peuvent également être interprétées comme une critique de l’idée de progrès historique, mettant en avant la circularité de l’histoire et la continuité des violences racistes. Kara Walker choisit l’esclavage comme image de la violence dans l’histoire de l’humanité, soulignant la barbarie de la nature humaine.

En 2007 avec « Bureau of Refugees : Freedman Brought to the Hospital shot Through the head by Unknown Parties », elle met en scène la violence raciste. Les silhouettes des personnages sont alors quasi-invisibles. Kara Walker laisse place à un vide laissé par le ciseau de l’artiste. L’utilisation de la silhouette comme procédé stylistique esthétise la violence et par ailleurs, met en lumière l’éradication de l’Autre. Cette esthétisation peut également être vue comme une façon d’embellir des scènes abominables pour rendre « agréables » à l’œil.

En 2014 dans son projet « A Subtlety, or the Marvelous Sugar Baby », elle aborde les questions de l’esclavage et du racisme à travers des personnages noirs caricaturés. Découvrez cette sculpture monumentale dans cet article à venir « Sculpture et art contemporain : ça se mange ? – 2ème partie ».
En 2016 le magazine anglais d’art contemporain Frieze célèbre ses 25 ans d’existence. « Gone: An Historical Romance of a Civil War as It Occurred b’tween the Dusky Thighs of One Young Negress and Her Heart » représente l’année 1994, date de création de l’œuvre. En 2017, elle transfert son atelier de création de Manhattan à Industry City, à Brooklyn, afin de bénéficier d’un espace plus vaste.

La Tate Modern de Londres en 2020 présente une fontaine imposante de 13 mètres de haut, intitulée « Fons Americanus ». Cette œuvre s’inspire du Mémorial Victoria près de Buckingham Palace. Mais au lieu de rendre hommage à l’Empire britannique, l’artiste a choisi de dénoncer ses crimes, notamment la traite des esclaves. Le conservateur Priyesh Mistri explique que Kara a renversé la célébration de l’Empire britannique à travers cette fontaine. Celle-ci met en lumière l’histoire collective de l’esclavage en Amérique.

À travers des œuvres ironiques et provocantes, l’artiste met en lumière les contraintes imposées aux minorités. Elle remet ainsi en question les attentes racistes de la société. Son approche, influencée par les artistes précédents comme Renée Cox, se démarque par sa radicalité. Elle refuse donc de se conformer aux normes esthétiques du mouvement « Black is Beautiful ». En utilisant le pastiche, Walker pousse les stéréotypes à l’extrême pour mieux les déconstruire. Cela met alors en lumière les absurdités et les violences sous-jacentes.

Malgré la critique de l’ironie et du pessimisme de Kara Walker, son travail d’artiste a eu un impact déterminant. S’affranchissant des questions raciales les artistes peuvent s’imposer sur la scène artistique sans avoir à se définir en tant qu’afro-américains.

À bientôt pour une nouvelle anecdote !

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