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Annette Messager : à bas les stéréotypes de genre !

Une artiste, une anecdote sur Annette Messager, une artiste qui défait les stéréotypes et incite à de nouvelles histoires.

Née en 1943 à Berck-sur-Mer dans le Pas-de-Calais, Annette Messager découvre l’art grâce à son père. Ce dernier l’introduit aux œuvres de Dubuffet, Goya et Ensor. En 1962, elle entame ses études aux Arts décoratifs de Paris, après avoir été acceptée à l’École des Beaux-Arts. Ses professeurs qualifient son travail de « viril », ce qui la pousse à quitter l’école. Elle veut alors démontrer que l’art peut être puissant sans ce qualificatif masculin, et tracer sa propre voie artistique.

Parmi ses premières créations, on trouve des boîtes en forme de maison, influencées par le surréalisme et l’œuvre de l’artiste Louise Nevelson. Annette Messager se démarque par sa façon de déconstruire les stéréotypes liés à la femme et à l’artiste en utilisant l’autofiction. L’artiste revisite les pratiques féminines traditionnelles comme la broderie et le tricot, tout en créant des personnages fictifs tels qu’Annette artiste, collectionneuse ou femme-pratique. Ses œuvres mêlent ainsi éléments autobiographiques et fictifs marquées par l’humour, la poésie et une distanciation inspirée des mythologies quotidiennes.

Après avoir interrompu ses études, Annette Messager collecte des articles et photos de magazines afin de constituer sa collection d’albums photo. Elle rencontre Christian Boltanski en 1969 et ils resteront en couple jusqu’au décès de celui-ci. Elle fait ses débuts artistiques en 1971 avec « Les Pensionnaires » pour la galerie Germain. Une installation en plusieurs vitrines contenant des moineaux empaillés, emmaillotés dans des tricots et présentés en diverses attitudes. Elle transforme déjà le langage artistique tout en affirmant alors subtilement son identité de femme et d’artiste. Son œuvre « Le Mariage de Mlle Annette Messager » de 1971 explore la figure féminine de manière ironique. Elle y critique les mythes sociaux associés aux rôles traditionnels des femmes.

Dans « Mes travaux d’aiguilles » en 1973, elle utilise un humour mordant pour remettre ainsi en question les rôles féminins traditionnels et réfléchir sur la perte de savoir-faire à travers une installation inspirée de la couture domestique. Elle réalise en 1974 « Ma collection de proverbes ». Elle brode sur quinze pièces de coton blanc des dictons misogynes, révélant des points de vue critiques sur la condition des femmes. L’artiste ne crée pas ces expressions sexistes, elles sont en effet courantes dans la langue française. Elles contribuent à véhiculer une image péjorative des femmes.

Entre 1972 et 1974, l’artiste questionne l’identité féminine et ses clichés à travers une série d’albums. Elle produit ainsi « Les hommes que j’aime, les hommes que je n’aime pas » affirmant le droit de la femme à juger l’homme. Ses travaux prennent ensuite la forme de cycles, intégrant des œuvres telles que « Les enfants aux yeux rayés », « Mes dessins d’enfant », « Tout sur mon enfant », « Mon livre de cuisine », « Mes dépenses au quotidien pendant un mois », « Ma collection de champignons bons et de champignons mortels », « Petites pratiques magiques quotidiennes » et « Mon idole Claude François ».

En 1975 pour la biennale de Venise, Christian Boltanski et Annette Messager créent ensemble l’installation « Voyage de Noces à Venise ». L’œuvre est composée de 21 dessins et 86 tirages couleur des monuments de la ville. En adoptant des poses et cadrages de photographie amateur, ils explorent ainsi les stéréotypes du voyage romantique sans ironie. Leur démarche s’apparente alors à une étude sociologique, révélant comment nous réinventons nos histoires personnelles pour les aligner sur l’histoire collective. Leurs images d’amour cachent une expérience partagée, joueuse du fantasme du bonheur à Venise.

Dans les années 1980, Annette Messager adopte un style métaphorique, utilisant ses expériences personnelles. Elle explore aussi bien les pratiques féminines que les espaces masculins, ridiculisant les stéréotypes et le pouvoir. Elle explore la fragmentation corporelle dans ses œuvres en utilisant des photographies de parties du corps. Dans son installation « Mes petites effigies » réalisée en 1988, Annette Messager combine des peluches, des photographies en noir et blanc, et ajoute des touches de crayons de couleur sur le mur. Elle observe que les ours en peluche reçoivent autant de coups que de câlins et remet en question l’innocence des crayons, qu’elle transforme en griffes d’enfants à travers ses œuvres. Ainsi, elle souligne que les peluches, tout comme les femmes, cachent une réalité moins douce qu’il n’y paraît. L’artiste poursuit cette démarche avec « Les Piques » en 1992, Annette Messager y explore les mouvements contradictoires de l’inconscient.

À partir des années 2000, elle se tourne vers la sculpture. L’artiste questionne ainsi toujours la condition féminine à travers des figures comme la sorcière. Ses œuvres mêlent éléments enfantins et scènes violentes, explorant l’innocence et la dualité du bien et du mal. En 2005, Annette Messager remporte le Lion d’or à la 51ème biennale de Venise pour son installation « Casino ». L’artiste aborde la transformation de Pinocchio en humain, les peurs infantiles et la fragilité du monde. Le tout est soutenu par des jeux de lumière évocateurs.

Dans « L’enclos du pantin » en 2005, Annette Messager crée « Sans légendes », une œuvre évoquant un monde post-cataclysmique. Des objets variés sont au sol, enveloppés de matière noire. Un éclairage projette les ombres, rappelant alors le mythe de la caverne de Platon, avec des références à des œuvres comme « Métropolis » de Fritz Lang et l’art de Giacometti. En 2007 le Centre Pompidou lui consacre une rétrospective, affirmant la portée de son travail. Une deuxième rétrospective d’Annette Messager est organisée en 2012 au Musée d’Art Moderne et Contemporain de Strasbourg.

À 80 ans passés, Annette Messager continu d’exposer. En 2022 c’est au LaM à Lille que l’artiste à présenté ses œuvres dont « Daily » réalisée en 2015. Cette installation faite d’objets géants en skaï noir, cintres, ciseaux, bagues, suspendus par un fil et auxquels s’y raccrochent des personnages rouges près à tomber. À nouveau l’artiste « épingle » le rôle et le quotidien auxquels les femmes ont été enfermées.

Annette Messager est une artiste polymorphe, mêlant peinture, sculpture, installation et photographie, influencée par le surréalisme et l’art populaire. Ses installations explorent les profondeurs humaines avec humour et sensibilité, transcendant le jugement moral. En s’appuyant sur des thèmes liés à l’enfance et au féminin, elle utilise dérision et métaphores pour interroger l’humain entre tragique et comique, tout en incitant le spectateur à se raconter une histoire.

Au revoir et à bientôt pour une nouvelle anecdote !

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