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Comment la sculpture soigne le corps et l’esprit

Les sculptures que l’on peut admirer dans la première partie de l’article sont de véritables petits trésors. Elles font parties de l’exposition « Médecine d’Asie, l’art de l’équilibre » du musée Guimet à Paris. L’exposition présente les trois grandes traditions médicales asiatiques : l’indienne, la chinoise et la tibétaine. La médecine, considérée comme une pratique intégrant une dimension spirituelle associe la guérison à la sagesse et à la compassion de divinités liées à la médecine. Par sa portée symbolique, la sculpture soigne l’esprit mais aussi le corps.

Dans la deuxième partie je suis allée en Grèce antique qui possède un patrimoine artistique extraordinaire. Il s’est étendu jusqu’à la Renaissance et à nos jours avec des artistes comme Jeff Koons (lien vers le site de l’artiste) ou d’autres contemporains.

Et détour vers les sculptures africaines. Elles ont une signification religieuse et culturelle importante. Guides et protection pour la communauté, également poupées de fertilité. Elles traduisent la profondeur de la pensée spirituelle et l’importance accordée à la figure maternelle. J’aborderai brièvement le rapport de l’OMS selon lequel sculptures et peintures faisant partie de notre patrimoine artistique peuvent soigner et ainsi contribuer à la guérison. Il met en évidence le pouvoir thérapeutique de l’art !

En Asie : protéger les individus des maladies et des dangers.


Protectrices, salvatrices et guérisseuses, les divinités sont considérées comme des bienfaitrices en Asie. Elles offrent des bénédictions tant sur les plans spirituels que physiques. Il existe des divinités communes à différentes religions orientales, invoquées pour protéger de maladies graves. Par exemple, Mariyammai, considéré comme un protecteur contre la variole dans l’hindouisme. Dans le bouddhisme, la déesse Hariti (connue sous le nom de Kishimojin au Japon), une ogresse apaisée par le Bouddha, vénérée comme la protectrice des enfants. Dans le taoïsme, la Dame de jade de la montagne Taishan, considérée comme une nourrice divine pour les nouveau-nés.

Hanuman en quête des herbes médicinales

Le bouddhisme compte un grand nombre de divinités associées à la guérison et aux soins. Bhaishajyaguru, le Bouddha de la médecine, Amitayus, le Bouddha de la longévité éternelle. Également des bodhisattvas tels que Avalokiteshvara, Guanyin en Chine et Kannon au Japon. Ces divinités sont considérées comme bienfaitrices de la santé et de la longévité. Afin d’en tirer des bénéfices, il est essentiel d’honorer correctement ces entités. Leur efficacité est intimement liée à la réalisation minutieuse de rituels spécifiques.

L’ayurveda et la médecine traditionnelle tibétaine sont des pratiques médicales anciennes en Asie. Elles se concentrent sur une approche holistique de la santé. Les textes fondateurs de l’ayurveda sont la Sushruta Samhita et la Charaka Samhita. Ces textes utilisent la doctrine des trois humeurs pour identifier les maladies. La médecine tibétaine se distingue par ses emprunts étrangers, principalement de l’Inde et de la Chine, et la formation médicale souvent associée à la religion. Les Quatre Tantra sont un texte fondateur de la médecine tibétaine.

Dieu des remèdes

Il y a des dieux que l’on prie pour avoir de la chance, bien voyager, être riche mais aussi guérir. Dans de nombreuses cultures asiatiques, les divinités sont souvent sculptées dans des représentations artistiques considérées comme sacrées. Ici encore, la sculpture soigne. Elles peuvent servir à plusieurs fins. En Chine, Corée et Japon, un médecin qualifié est celui qui peut prévenir la maladie en équilibrant les fonctions organiques, les processus de régénération du corps et le mode de vie du patient. Il ne guéri pas simplement la maladie. Le concept clé de cet équilibre est le « souffle vital », appelé « qi » en chinois. Il circule dans douze canaux connus sous le nom de méridiens et reliés aux douze organes principaux.

Selon le pays et l’époque, quand on est malade, on peut s’adresser à une divinité.

Le Bouddha de médecine, également appelé « Maître des remèdes ».

Les gens prient souvent ce dieu pour être chanceux, voyager en sécurité, ou encore pour devenir riches, mais ils le sollicitent également pour retrouver la santé. Figure spécifique du bouddhisme Mahayana, il se consacre particulièrement à soulager les maux physiques et mentaux des êtres. On le reconnaît facilement grâce au mortier qu’il tient dans sa main gauche. Ce bol sert à broyer les herbes médicinales en vue de préparer des remèdes et des antidotes contre les maladies et les poisons. Ce texte apparaît pour la première fois en Inde du Nord, traduit en chinois, japonais et tibétain au fil des siècles. Le Bhaishajyaguru Sutra décrit les douze vœux du « Maître des remèdes », qui guérit tous les êtres souffrant d’affections physiques et mentales depuis une terre pure située à l’Est.

Le Bouddha de médecine, « Maître des remèdes »

Wen Qiong

Wen Qiong, une divinité du taoïsme chinois 17ème siècle, aide à protéger contre les catastrophes et les démons et est vénéré pour éloigner les démons porteurs de maladies. Il est un assistant de Dong Yue Da Di, qui est le régent de la vie sur terre et qui fixe les dates de naissance et de mort. La tradition rapporte que l’entrée des enfers se trouve au pied du mont Taishan, où Dong Yue Da Di règne.

Wen Qiong, Chine, 17ème siècle


Le dieu du Nord Chine

Cette figure divine taoïste est vénérée pour ses pouvoirs magiques en tant que guérisseur et expert en exorcisme.

Le dieu du Nord Chine, 18ème siècle, Bronze


L’arhat Angaja

Les arhat, appelés rakan en japonais, sont des êtres saints avec des pouvoirs miraculeux comme la protection et l’exorcisme. Ils aident à la compréhension de la relation entre la nature et l’humain. Angaja est représenté avec des sourcils longs et un sceptre contenant le Joyau pour symboliser la connaissance de la Loi bouddhique.

L’arhat Angaja, Japon 17ème siècle, Bois


Le Jizo

Jizo, considéré comme un bodhisattva, est sollicité par les croyants pour obtenir de l’aide tant dans la vie quotidienne que dans l’au-delà. Il est particulièrement vénéré pour sa capacité à protéger et guérir les enfants, ainsi qu’à assurer une grossesse heureuse. Ayant l’apparence d’un moine aux cheveux rasés, il vient en aide aux malades, prend soin des enfants à naître ou nouveau-nés et assure la protection contre différents dangers. Le Jizo est aussi représenté avec un bâton de pèlerin comportant six anneaux et un Joyau exauçant les vœux.

jizo
Jizo, Japon, Epoque Edo 18° siècle. Bois laqué et bronze Japon

Palden Lhamo

La déesse est active dans divers domaines d’intervention. Dans le domaine médical, elle peut engendrer les plus grands fléaux tout en protégeant simultanément ses adorateurs. Elle dispose d’armes magiques, dont un sac rempli de miasmes et de bactéries suspendu à sa selle, qui agit comme une bourse toxique. Cela lui permet de déclencher ou de contrôler la peste, la lèpre, la variole, le choléra et bien d’autres maladies.

Palden Lhamo, Mongolie 19ème siècle, Cuivre

Les sculptures permettent de représenter également des personnages hors du commun ayant accompli de grandes actions. Ils servent alors d’exemples concrets.

La reine Jayarajadevi

Datant du début du XIIIe siècle au Cambodge, ce portrait montre une adepte dévouée du bouddhisme, vouée à l’ascétisme. Son visage en maigreur reflète les privations et les rigueurs qu’elle s’imposait. Mais son expression sereine témoigne de son âme pure. L’aspect spirituel est crucial dans la médecine asiatique. Elle met en avant l’équilibre entre le corps et l’esprit pour la santé et la guérison.

Portrait supposé de la reine Jayarajadevi : un esprit dévoué

Le roi Jayavarman VII

Le roi Khmer Jayavarman VII, qui a régné entre 1181 et 1220, a fondé de nombreux hôpitaux dans tout son empire. Certaines inscriptions indiquent qu’il souffrait, mais de manière moins importante que ses sujets. Selon lui, la douleur des rois est liée à la souffrance de leur peuple.

Portrait du roi Jayavarman VII, Cambodge fin du 12ème siècle, Pierre

La Grèce entre mythe et médecine


La Grèce antique est connue pour sa richesse culturelle et artistique. La sculpture de divinités jouant un rôle important dans cette période de l’histoire. Les artistes s’inspiraient de la mythologie grecque pour créer des représentations impressionnantes de dieux et de déesses, souvent exposées publiquement dans des lieux comme les temples. Ces sculptures s’utilisaient dans la vie quotidienne en lien avec les cultes et la médecine. Les statues de dieux guérisseurs, réputées pour leur pouvoir de guérison et de protection, ont eu une forte influence sur les pratiques médicales de l’époque.

Les dieux grecs, présents sur tous les fronts, la sculpture soigne

En Grèce antique, les divinités étaient considérées comme des acteurs importants pour la guérison et le traitement des maladies. La plupart des dieux et déesses étaient vénérés pour leur capacité à protéger la société et les individus. Mais étaient également reconnus pour leur capacité curative. Invoqués dans la lutte contre la maladie et la douleur, ils symbolisent la lutte contre les forces négatives.

De l’eau purificatrice aux oracles divinatoires

La consultation d’oracles fait partie des pratiques divinatoires également largement utilisées pour la détection et le traitement des maladies. Les rites en rapport avec la santé avaient une fonction purificatrice et expiatoire. Ils impliquaient la divination à travers les rêves et accordaient une place importante à l’eau. Les dieux grecs étaient considérés comme divins seulement lorsqu’ils recevaient l’hommage des hommes, qui répartissaient et honoraient les divinités comme leurs concitoyens.


Les artistes ont créé des représentations de dieux et de déesses inspirées des mythes et légendes de la mythologie grecque. Cette inspiration dure à travers les âges comme avec la Pythie ornant l’opéra Garnier, vous pouvez lire une anecdote à ce sujet. Ces sculptures étaient souvent utilisées dans la vie quotidienne en lien avec les cultes et la médecine. Les dieux, demi-dieux et héros partageaient souvent les mêmes fonctions, iconographies et cultes en rapport avec la guérison et le traitement en Grèce antique. Ainsi, les croyances et pratiques en lien avec les dieux et déesses fournissaient des méthodes de soins, de guérison et de traitement aux croyants de l’époque.


Divinités grecques et santé

Zeus et Apollon

Les deux dieux les plus couramment associés à la guérison. Zeus, particulièrement reconnu pour ses pouvoirs de guérison, aidait également les gens à acquérir des biens matériels. De même Apollon, honoré pour ses pouvoirs curatifs qui lui permettaient de prévenir et de guérir les épidémies, ainsi que pour sa capacité à purifier les esprits et prédire l’avenir.

Héraclès

Héraclès était nommément concerné par la santé, souvent associé à la vigueur physique et à la force. Il luttait contre le mal et la mort en plus de ses fonctions de protecteur de la jeunesse et des athlètes. Honoré dans son sanctuaire de Mélitè, Héraclès aurait fait cesser la grande peste d’Athènes selon une tradition rapportée par une scholie d’Aristophane. Dans l’iconographie du début du 5ème siècle, Héraclès se voit représenté comme le vainqueur impitoyable de Géras, le gnome difforme porteur des stigmates physiques de la vieillesse. En outre, il était également capable de révéler des solutions à des problèmes par la voie des rêves, comme en témoigne la vie de Sophocle.

Athéna

Athéna recevait les honneurs sur l’Acropole pour sa fonction de pourvoyeuse de bien-être et de bonne santé physique. Des témoignages, tels que la dédicace du potier Euphronios et le récit de Plutarque dans la Vie de Périclès, suggèrent qu’Athéna était également capable de révéler les solutions pour soigner les maladies et blessures.


La sculpture de divinités, hautement appréciée en Grèce antique a eu une influence majeure sur les pratiques médicales de l’époque. Les croyances et pratiques en lien avec les dieux et déesses fournissaient des méthodes de guérison et de traitement. Les divinités grecques, actrices importantes pour soigner les maladies, bénéficiaient de nombreux cultes mettant en avant celles spécifiquement liées à la santé. Ces représentations continuent de fasciner et de captiver les gens du monde entier. Cela témoigne de l’influence persistante de la Grèce antique sur la culture et l’art moderne.

Pour aller plus loin si vous le souhaitez voici un lien vers un article « Les héros guérisseurs : des dieux comme les autres ! À propos des cultes médicaux dans l’Attique classique » sur le site Openedition.

L’Afrique : de la signification sacrée à la fascination artistique


Les réalisations artistiques africaines ont fasciné de nombreuses personnalités européennes, allant d’André Breton à Picasso au cours du 20ème siècle. Ces sculptures, perçues principalement comme des œuvres artistiques par les occidentaux, possèdent pourtant une signification sacrée dans les rituels africains. Leur rôle cérémonial les rend uniques parmi les autres formes d’art ethnique. Au fil du temps, ces sculptures achetées par des ethnologues en mission et des coopérants coloniaux se verront exposées dans des musées ou les intégrées à des collections privées prestigieuses. L’art africain a aussi influencé l’art contemporain en valorisant la beauté, l’histoire et la culture africaine, ce qui a favorisé une compréhension plus profonde de la riche culture africaine.

Des masques sur un marché


Quelques sculptures d’art primitif dans la culture de pays africains

Les masques Dan

Ce sont une forme d’art traditionnelle de Côte d’Ivoire pour les cérémonies de danse. Sculptés dans du bois dur avec des yeux ovales et une bouche déformée, ils ont une signification religieuse et culturelle .

Les sculptures en bois Baoulé

Ces oeuvres représentent des divinités, des ancêtres ou des chefs tribaux. La communauté Baoulé les considère comme des sources de guidance et de protection. Elles peuvent servir à communiquer avec les esprits ou demander leur aide lors de problèmes ou de difficultés. Cependant, la culture Baoulé possède également une tradition de soins à travers l’utilisation de plantes médicinales, de rituels et de pratiques de médecine traditionnelle. Les sculptures peuvent s’y intégrer pour aider à la guérison.


Les sculptures rituelles Fang du Gabon

Elles trouvaient leur utilité dans des cérémonies pour entrer en relation avec les ancêtres et les esprits, des cérémonies de guérison pour communiquer avec les esprits guérisseurs. Les sculptures reliquaires sculptées dans des formes humaines ou animales contenaient les restes des ancêtres. Elles représentaient souvent des figures humaines ou animales avec des cornes, des dents ou des griffes, pour symboliser leur puissance et leur force.

Les statues Ashanti du Ghana.

Les poupées de fécondité, appelées Aku-aba ou Akwaba, appréciées pour leurs propriétés protectrices et traditionnellement portées par les femmes du Ghana et de la Côte d’Ivoire, facilitaient les naissances et prévenaient la stérilité. Les Akans du Ghana représentaient ces poupées avec des têtes circulaires plate très stylisées


Les sculptures en ébène de Tanzanie et du Mozambique

Issues de la culture Makondé, elles témoignent de la spiritualité et des croyances mystiques de ce peuple. Elles illustrent également la grande place qu’occupe l’ancrage familial, avec une vénération de leurs ancêtres et une forte considération pour la figure maternelle.

La sculpture et l’art pour toujours favoriser une meilleure santé mentale et physique


Pour revenir un peu plus près de notre époque n’oubliez pas que selon un rapport de l’OMS, l’art peut avoir des effets bénéfiques sur la santé mentale et physique. Les neurosciences ont démontré que notre cerveau et notre corps entrent en résonance avec la création artistique. Cela confirme ainsi l’idée que la sculpture, l’art soigne et peut jouer le rôle d’un tuteur de résilience essentiel à notre vie. En effet, l’art peut aider à faire face aux épreuves de la vie et à se reconstruire après un traumatisme.

Grâce à la pratique ou à l’appréciation de l’art, nous pouvons également élargir notre vision du monde. Nous pouvons aussi mieux comprendre les autres cultures. C’est notamment le cas à travers le développement de l’art-thérapie qui utilise l’expression créatrice pour favoriser une meilleure santé mentale. Enfin, participer à des activités artistiques peut améliorer la qualité de vie des personnes âgées ou atteintes de maladies chroniques, en leur offrant une source de distraction et de créativité. En somme, l’art revêt donc une importance particulière dans la promotion du bien-être et de la santé, tant mentale que physique, de chacun d’entre nous.

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